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Docteur Antho & Mister Sid
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5 juillet 2012

Jour 2 (The Wall part III)

Le lendemain, il se réveilla, et rien n'avait changé. Ça lui semblait bizarre, parce qu'il avait totalement oublié tout cela, mais se dit qu'il allait lui falloir un temps d'adaptation pour s'habituer à sa nouvelle condition. Il tourna la tête et vit une masse qu'il avait posé là il y a longtemps. Il avait décidé de la garder de ce côté du mur, au cas où il aurait à le détruire, mais plus le temps passait, plus il se disait que cette masse serait inutile et que c'était un mal nécessaire.

Il se sentait mieux qu'hier, ce qui était également bizarre vu l'immobilité de la situation. Il prit sa guitare et se surprit à jouer un vieux morceau qu'il avait appris étant gosse, et qui parlait d'amour, ce même amour qui l'avait poussé à s'éloigner des autres, et du monde extérieur et de ce qu'il était avant.

 

« Mother, do you think she's good enough, for me ?

Mother, do you think she's dangerous, to me ?

Mother, will she break my heart ? »

 

Il se rappela qu'avant de construire cet édifice, les gens disaient de lui qu'il était adorable, qu'on pouvait lui faire confiance, et tous les gestes qu'il se rappelle tendaient à prouver cela. Bien sûr, comme pour tout le monde, il avait eu à lutter contre des personnes jalouses, ou contre des personnes qui lui voulaient du mal, mais il avait appris à faire avec, et globalement, tout se passait plutôt bien. On lui avait dit, dans les moments où il doutait, que les choses s'arrangeraient, et qu'une jolie demoiselle viendrait l'aider à s'en sortir. Il avait du coup appris à vivre en espérant cela, et en essayant de donner un petit coup de pouce au destin. Puis petit à petit, échec après échec, il avait perdu confiance en lui, puis confiance en les autres, pour finalement s'éloigner de tout le monde et se retrouver seul. Peut-être qu'en agissant différemment, il s'en serait sorti et ce que les autres lui avaient dit se serait trouvé vrai, mais il était descendu tellement bas que le mur lui avait semblé être la seule vraie solution à l'époque, et aujourd'hui encore.

Il se rappela aussi de celle à cause de qui il avait commencé à assembler les briques une par une, celle qui lui avait promis de faire envoler tous ses soucis, celle qui lui avait promis une vie entière sous le signe d'un amour éternel... Ceux de l'autre côté du mur lui avaient dit que ça ne durerait pas et qu'on ne trouve pas l'amour éternel ainsi... Mais il ne les avait pas écouté, il avait vécu cette histoire en croyant tout ce qu'elle lui disait, il a profité le plus possible, jusqu'au jour où elle l'avait quitté sans même s'expliquer, parce qu'elle en préférait un autre... C'est ce jour là qu'il avait compris que la seule erreur qu'il avait commise avait été de croire que quelqu'un allait l'aider à s'en sortir. C'est également ce jour là qu'il avait décidé de poser les premières pierres de son édifice qui le couperait du monde quelques mois plus tard.

Puis après elle, il avait espéré à nouveau, par deux fois... Par deux fois, ses espoirs avaient été réduits à néant, et les deux personnes en question ne savaient même pas le mal qu'elles lui avaient fait, involontairement. Il repensait à tout cela, et rien ne le marquait, rien ne lui manquait, plus maintenant. Maintenant, il avait fait le deuil de tout cela, et n'était pas malheureux d'avoir réussi cela, peu importe le prix qu'il payait pour cela.

Elle était revenue chez elle, sans résultats dans sa recherche puis s'était endormie. Elle avait fait de drôles de rêves, et s'était réveillée à plusieurs reprises, avec des difficultés pour se rendormir. Elle ne savait pas pourquoi, mais elle faisait le lien entre ses terreurs nocturnes et ce mot, qu'elle avait laissé sur sa table de chevet. En se levant se matin, elle le relut, encore une fois, comme pour se l'imprégner, comme pour en faire une photographie mentale et ne pas l'oublier. Que voulait-il vraiment dire ?

Il y a quelques années, elle aussi en avait eu marre de cette vie. Elle, la campagnarde, parfois rustre, mais si attendrissante, en avait eu marre du regard des autres, et de son propre regard sur elle-même. Elle avait pensé à mettre fin à ses jours, mais ses parents avaient été là pour l'en empêcher, et la thérapie qui avait suivi l'avait aidée à aller mieux, et à ne plus intenter à sa vie.

Depuis, elle s'était entourée d'une bande de copines avec qui elle s'amusait, avec qui elle profitait de la vie, même si parfois elle avait besoin de se retrouver seule, parce qu'elle ne se sentait plus elle-même. C'était ce qui lui permettait d'assurer son équilibre.

D'ailleurs, cet après-midi, elle irait en ville avec ses amies, elle oublierait sa nuit agitée et tout ce qui s'était passé depuis deux jours. Elle ne penserait pas à cette homme qui était sûrement déjà mort. Mais, même si elle ne le connaissait pas, elle se rappelait cette phrase que lui avait dit sa grand-mère avant de s'éteindre : « On meurt toujours deux fois, la première mort est physique, c'est celle que tout le monde connaît, et avec laquelle on doit vivre, la seconde est lorsque plus personne ne se souvient de vous, et celle-là fait encore plus mal... »

Il était mort même si son coeur battait encore...

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